Halg Ejjmel, géosite n°5
Coordonnées GPS: N 33.40739° E 010.17687°, altitude 313m.
Le Djebel Tebaga de Médenine est le massif le plus ancien de Tunisie et le site sédimentologique le plus important de la région. Estimé de valeur universelle et en cours de classement par l’UNESCO, il constitue l’unique affleurement de Permien supérieur (environ 250 millions d’années) marin en Afrique.
Le site est desservi par plusieurs routes en provenance de Médenine, de Ksar Jedid et de Dkhilet Toujane.
Situé sur le versant sud de Jbel Tebaga et au pied du talus dominé par le sommet de Kef Ennsoura, ce site permet d’appréhender le majestueux contraste d’altitude entre le plateau du Dahar et la plaine de la Jeffara.
Il s’agit d’un massif monoclinal formant un chaînon montagneux long de 3km, ayant une orientation est-ouest et aux couches inclinées de 30° vers le Sud. Avec son orientation et son inclinaison, nettement différentes de celles des escarpements bordant le plateau du Dahar qui ont une orientation subméridienne et une structure tabulaire, ce massif parait émergé au sein des terrains secondaires résultant d’une histoire géologique autre que celle des terrains qui l’entourent et qui reposent en discordance angulaire sur ses strates sédimentaires. En effet, le Jebel Tébaga de Médenine est constitué par des formations géologiques d’âge Permien supérieur. C’est le massif le plus ancien en Tunisie et est l’unique affleurement de Permien supérieur (environ 250 millions d’années) marin en Afrique. Il fait actuellement l’objet d’un projet de réserve géologique. Ses terrains sont de nature marine et fossilisent l’un des plus importants évènements dans l’histoire géologique du globe terrestre. C’est le grand rifting qui a donné naissance à l’océan Téthys et qui a scindé la Pangée, ce continent géant et unique de la Terre de la fin de l’ère primaire, en deux supers plaques : la plaque de la Laurasie au Nord et la plaque du Gondwana au Sud.
Les fossiles rencontrés dans ces terrains permiens sont d’une richesse et d’une diversité exceptionnelle et matérialisent les derniers organismes de l’ère Primaire avant la grande crise ayant affectée la vie sur l’ensemble du Globe terrestre et provoquée la disparition à jamais d’environ 90% des espèces animale et végétale. A côté des éponges et des coraux qui construisaient, dans les eaux chaudes et claires du jeune océan Téthys, de nombreux et importants édifices récifaux qui sont fossilisés dans les deux principales barres calcaires du massif de Jebel Tébaga connues sous les noms de Bioherme inférieur et bioherme supérieur, on note l’abondance des lys de mers ou crinoïdes, des niveaux à Bellérophons, plusieurs espèces de Fusulines et l’un des derniers représentants des Trilobites et l’unique trilobite tunisien : Pseudophyllipsia azzouzi. Ce trilobite à fait l’objet d’un timbre postal pour la mise en valeur du patrimoine géologique en Tunisie.
La structure monoclinale des terrains du Permien supérieur de Jebel Tébaga de Médenine et la juxtaposition, en discordance angulaire des terrains mésozoïques sus-jacents sont les témoins d’une ancienne orogenèse contemporaine de la crise permo-triasique et qui a soulevé, depuis, le massif du Tébaga pour en faire un archipel. Ce dernier est resté émergé jusqu’à la fin du Crétacé inférieur il y a environ 100 millions d’année pour être inonder au début du Crétacé supérieur lors de la grande transgression crétacée.
Les premiers ravins qui descendent du talus sont tout de suite aménagés en jessour. La taille des tabias construites est très importante dans ce site et peut dépasser 3 m de hauteur vu sa position à proximité des reliefs ce qui confère une énergie importante aux ruissellements lors des crues. L’emplacement des déversoirs profite de l’affleurement de la roche en place. Leurs bordures sont fortifiées par de la pierre sèche (sira).
Par rapport aux collines et versants environnants, les ravins encaissées et creusés dans le calcaire, les marnes et les grès caractéristiques du massif montagneux de jebel Tebaga sont des milieux assez frais. De ce fait, ils sont propices au développement d’une flore assez particulière, où on note surtout la présence de Pénnisétaire sétacé (Oum Roukba, Pennisetum setaceum) ; espèce pérenne à port élancé et à inflorescence de couleur rougeâtre avec un axe bien velu qui laisse apparaître des épillets solitaires. Cet aspect morphologique de la plante lui rend très repérable de loin.
Ce taxon qui n’existe qu’au sud du pays est appété par les ovins et les caprins leurs graines sont collectées pour la consommation humaine.
Vue depuis Kef Ennsoura (géosite n°4) montrant l’alignement vers l’Est des deux principales barres calcaires du J. Tébaga et leur pendage vers le Sud. La discordance entre les couches de l’ère primaire et celles de l’ère Secondaire est indiquée par les flèches blanches. En bas à droite, la configuration de la Terre vers la fin de l’ère primaire. (Cliché Amine Berriche)
La même discordance angulaire, indiquée par les flèches blanches sur la photo précédente, observée depuis le village de Halg Ejjmel. Les couches inclinées sont d’âge Permien supérieur et sont couvertes par les couches tabulaires transgressives du Crétacé supérieur. (Cliché Mohamed Ouaja)
Bellérophons enchâssé dans la vase carbonatée (cliché Nouri Boukchim)
Fusilines (cliché Nouri Boukhchim)
G : Fusuline en section (cliché Mohamed Ouaja) / Dr : Timbre-poste représentant le trilobite du Permien du Tebaga
Entroques de crinoïdes ou lys de mer (cliché Mohamed Ouaja)
Par ailleurs, l’affleurement des gypses en surface a favorisé la prolifération de plusieurs gypsophytes comme l’Erodium arborescent (Toummir ejmèl, Erodium arborescens), le thym de Crête (Zaâtar, Thymus capitatus), le diplotaxis (Harra, Diplotaxis harra), le stipe à petites feuilles (Aâdham, Stipa parviflora)…
L’occupation du sol aux environs du site de Permien marin (secteur de Halg Jemel) constitue un autre élément fort de la diversité paysagère du Dahar. Le système cultural est articulé autour des oliviers (surtout les cultivars Chemlali et Zarrazi) et des figuiers (cultivars Zidi, Jemaoui, Saoudi, Ragoubi, Bayoudhi, Bither…) à coté du palmier. En outre, d’autres arbres fruitiers comme les vignes, les pommiers sont visibles dans certaines parcelles, dont la production est totalement destinée à la consommation familiale.
Au cours des années particulièrement humides, les terres dans les jessour sont occupées par une céréaliculture de subsistance basée sur le blé et l’orge (variété locale, Ardhaoui).
On note enfin, que les différentes composantes du système des jesour dans le secteur de Halg Jemel sont bien entretenues (banquettes, déversoirs, impluviums, les Mejens, les Fesquias…), ce qui prouve que l’agriculture demeure encore, la principale source des revenus des ménages dans ces communautés rurales locales.